Avant d’étudier les doctrines et pratiques chiites, il est nécessaire de savoir les sources sur lesquelles se basent les chiites pour comprendre l’Islam. Dans ce qui suit nous allons étudier les quatre sources (bases) de la pensée chiite, c’est à dire les quatre sources sur lesquelles, du point de vue chiite, toute investigation sur l’Islam doit se reposer: Le Glorieux Coran, La Sounna (tradition prophétique), le raison et le consensus.
Il n’est pas besoin de dire que le Coran est la plus importante source pour tous les Musulmans, y compris les chiites. Le Coran agit également comme un instrument d’unité parmi tous les Musulmans. Indépendamment de leurs contextes sectaires ou culturels, tous les Musulmans se réfèrent au même livre comme un guide divin pour gouverner leur vie. De nos jours, comme de tout temps, il n’existe qu’un seul Coran, sans aucun ajout ni altération à travers le monde Musulman. Un point important typiquement chiite sur le Coran se trouve dans le passage suivant:
Nous croyons que le Coran est une inspiration divine, et révélée par Allah dans la langue de Son Honorable Prophète, mettant au clair toute chose, un miracle éternel. L’homme est incapable d’écrire quelque chose de semblable à cause de son éloquence, sa clarté, sa véracité et son savoir et aucune altération ne peut lui être apportée. Le Coran que nous avons actuellement est exactement celui qui a été envoyé au Prophète, et quiconque affirme le contraire est soit un malfaiteur, un simple sophiste ou encore une personne dans l’erreur et ils se sont tous égarés car Allah dit: «Le faux ne peut l’atteindre ni par devant ni par derrière» (41:42).
…Nous croyons aussi que nous devons respecter et accorder la dignité au Saint Coran aussi bien en paroles qu’en actes. Par conséquent, il ne doit pas être souillé intentionnellement, même pas une de ses lettres, et il ne doit pas être touché par celui qui n’est pas «tahir» (rituellement pure). Il est dit dans le Coran «que seuls les purifiés touchent» (56:79). [Muzaffar, p. 26].
Comme souligné plus haut, Les chiites nient toute altération dans le Coran et croient que le Coran actuellement en vigueur est le même que celui qui a été révélé au Prophète Mohammad. Le Coran est complet. Personne n’a jamais vu une copie du Coran différent de celui en vigueur dans aucune partie du monde islamique. Il y a des manuscrits du Coran disponibles de nos jours qui datent du temps des Imams Chiites et ils sont exactement les mêmes que ceux qui sont courants
Le Glorieux Coran dit explicitement lui-même que Dieu Lui-même le préserve de toute altération ou distorsion:
Concernant ce verset, ‘Allamah Tabatabà’ï dans son célèbre commentaire Al Mizan fi Tafsir al Qour’àne, l’un des plus grands commentaires stipule:
… Le Coran est un Rappel vivant et éternel qui ne mourra ni ne tombera jamais dans l’oubli. Il est immunisé de toute addition ou perte. Il est immunisé et préservé contre toute altération de forme ou de style pouvant affecter son caractère ou rôle qui est «Le Rappel d’Allah qui manifeste la vérité et la connaissance divine». Pour cette raison, le verset précité indique que le livre divin a été et sera toujours gardé des distorsions ou altérations
Après le Glorieux Coran, la source la plus importante pour comprendre l’Islam, et donc la pensée chiite, est La Sounna du Prophète Mohammad, comprenant ses paroles et ses actions. Le Coran accorde lui-même cette haute position au Prophète, comme celui qui est responsable d’expliquer le Coran (16:44), d’enseigner le Coran et la sagesse (62:2). Le Prophète est l’exemple parfait pour les croyants (33:21). Il ne parle jamais de sa part (53:3). Les Musulmans sont tenus de respecter ce qu’il leur donne et ce qu’il leur interdit (59:7).
Sachant les versets précités et beaucoup d’autres versets concernant la qualité du Prophète et prenant en considération la signification d’être un messager divin directement choisi par Dieu et Qui lui a parlé, les Chiites ainsi que d’autres Musulmans, cultivent un esprit d’amour et de dévotion sincère pour le Prophète Mohammad.
On ne trouve aucun désaccord parmi les Musulmans sur la validité de suivre les enseignements des gens de la maison du Prophète pour comprendre l’Islam, spécialement selon la vue Sunnite qui considère même que tous les compagnons du Prophète sont de sources valables pour comprendre l’Islam. [2] Ce fait devient encore plus clair si l’on se réfère aux traditions du Prophète sur les gens de sa maison et examinons les paroles des érudits Sunnites sur le savoir de Ali et les membres de la maison du Prophète. Par exemple, Imam Malik dit: «Aucun œil n’a vu, aucune oreille n’a entendu, et aucune inspiration n’a atteint le cœur d’un être humain mieux que Ja’far b. Mohammad, qui est distingué par son savoir, sa piété, son ascétisme, et sa servitude à Dieu». C’est ce qu'Ibn Taymiyah rapporte d’Imam Malik dans son livre. [3] Dans une étude sur ceux qui ont rapporté d’Imam Sadiq, Shaykh Al Moufid (mort en 413 AH) dans son Al-Irshad soutient que les rapporteurs dignes de confiance parmi les différentes écoles de pensées étaient au nombre de 4000. Ainsi, il n’y a ici aucune ambiguïté et c’est pourquoi beaucoup d’érudits Sunnis tels que feu Shaykh Shaltut ont clairement émis que chaque Musulman peut agir selon l’une des cinq écoles de pensée de fiqh: Ja’fari, Hanafi, Hanbali, Maliki et Shafi’i.
La raison en est claire, car si Imam Ja’far as Sadiq, par exemple, ne possédait pas plus de savoir ou un meilleur accès au savoir du Prophète que les autres, on devra admettre qu’il devait être au moins égal aux autres, spécialement si l’on a dans l’esprit ceux qu’il a enseigné tels que Abou Hanifah, l’Imam des Musulmans Hanafis qui a suivi les cours d’Imam Ja’far As Sadiq pendant deux ans.
Les gens qui sont instruits ou qui cherchent la vérité doivent par conséquent examiner toutes les sources islamiques disponibles, et atteignent ainsi une conclusion sur la voie qui mène les Musulmans à la vie exemplaire. L’une des sources riches est certainement les enseignements des gens de la maison du Prophète. Maintenant, voyons s’il est nécessaire de se référer aux gens de la maison du Prophète pour comprendre l’Islam. Pour répondre, je me concentrerai seulement sur des traditions du Prophète raconté par un grand narrateur Sunnite qui est accepté des érudits aussi bien Chiites que Sunnites. Mais préalablement, il faut noter que tous les enseignements des gens de la maison du Prophète étaient toujours basés sur le Glorieux Coran et la Sounna du Prophète. Il ne faut pas penser, par exemple, qu’Imam Sadiq disait quelque chose selon son opinion personnelle sur l’Islam. Ce qu’ils ont émis, est exactement ce qu’ils ont eux-mêmes reçu du Prophète. Il y a beaucoup de traditions sur ce sujet. Par exemple, dans Usul Al Kàfi, nous trouvons qu’Imam Sadiq a dit que ce qu’il émet est ce qu’il a reçu du Prophète à travers son père et ses ancêtres.
Une de ces traditions est la fameuse tradition de Thaqalayn. Cette tradition a été émise par le Prophète en différentes occasions, y compris le jour de ‘Arafat dans son dernier pèlerinage et le 18 Zilhajj à Ghadir Khoum. Malgré des différences mineures dans la formulation, l’essence reste la même dans toutes les versions. Par exemple, dans une version de la tradition, le Prophète a dit:
;«O les gens, je laisse parmi vous deux choses précieuses: le Livre de Dieu et les gens de ma maison. Aussi longtemps que vous vous y accrocheriez vous ne vous égarerez pas».
Ou dans une autre tradition le Prophète a dit:
«Je laisse parmi vous deux choses précieuses, auxquelles si vous vous accrochez vous ne vous égarerez pas après moi: le Livre de Dieu qui est comme une corde étendue entre le paradis et la terre, et les gens de ma maison. Ces deux choses ne se sépareront pas jusqu’à ce qu’elles me retrouvent près de la fontaine, le Jour du Jugement. Prenez soin du traitement que vous leur réserverez après moi.»
Cela montre que le Prophète se souciait de la façon dont les Musulmans, ou au moins une partie d’eux, allaient traiter le Coran et les gens de sa maison. Dans une autre tradition il a dit:
«Je laisse deux successeurs: le premier, le Livre de Dieu qui est comme une corde étendue entre le paradis et la terre, et le deuxième, les gens de ma maison. Ils ne se sépareront pas jusqu’à ce qu’ils viennent à moi près de la fontaine de Kawthar.»
On trouve les traditions précitées dans les sources majeures Sunnites, telles que: Sahih de Muslim (Vol. 8, p. 25, n° 2408), Musnad d’Imam Ahmad (Vol. 3, p. 388, n° 10720), Sunan de Darimi (Vol. 2, p. 432), et Sahih de Tirmidhi (Vol. 5, p. 6432, n° 3788). Elles sont aussi mentionnées dans les livres tels que Usd al-Ghabah d’Ibn Athir (Vol. 2, p. 13), Al-Sunan al-Kubra de Bayhaqi (Vol. 2, p. 198) et Kanz al-‘Ummal (Vol. 1, p. 44).
Maintenant réfléchissons sur le contenu de ce hadith, c'est-à-dire le fait que le Prophète ait laissé deux choses importantes: le Coran et les gens de sa maison, et qu’aussi longtemps que les gens s’attacheront à ces deux choses, ils ne s’égareront pas. Cela montre que ces deux choses doivent toujours être en harmonie l’une et l’autre, et qu’elles ne se contrediront jamais. Sinon, le Prophète n’aurait pas donné l’instruction de les suivre toutes deux. D’ailleurs, les gens ne sauraient quoi faire si les gens de la maison du Prophète leur diraient d’aller dans une direction et le Livre de Dieu dans une autre direction. Bien que ce hadith soit implicitement incompréhensible à première vue, le Prophète l’explique lui-même explicitement en confirmant «… ils ne se sépareront pas jusqu’à ce qu’ils me rejoignent près de la fontaine de Kawthar».
Ainsi, ce hadith dans toutes ces versions indique que:
- Depuis le temps du Prophète jusqu’à la fin du monde, le Livre de Dieu et les gens de sa maison seront toujours ensemble
- Personne ne peut dire que le Livre de Dieu est suffisant, et que nous n’avons pas besoin des gens de la maison du Prophète, et vice versa, car le Prophète a clairement dit: Je laisse deux choses importantes (lourdes de conséquence) auxquelles vous devez vous référer, et si vous vous y conformez, vous ne serez pas traduit en erreur.
- Les gens de la maison du Prophète sont exempts d’erreurs et ils sont toujours fidèles.
- Il est aussi intéressant de noter que selon ce hadith, les gens de la maison du Prophète, comme le Coran lui-même, resteront continuellement valables jusqu’au Jour du Jugement et le Paradis. Ainsi, les gens de la maison du Prophète ne disparaîtront jamais, même pour une courte durée.
L’autre hadith est celui de Safinah (bateau). Tous les Musulmans ont rapporté que le Prophète a dit:
«Sachez qu’en vérité l’exemple des gens de ma maison parmi vous est comme l’exemple du bateau du Prophète Noé. Ceux qui sont montés à bord du bateau de Noé ont été sauvés, et ceux qui ont refusé de le faire se sont noyés».
Le hadith de Safinah dans ces différentes versions insiste sur le même fait et peut être trouvé dans différents livres Sunnites. Par exemple, on le trouve dans Mustadrak de Hakim Nishaburi, Vol. 3, pp. 149&151, Arba‘in Hadith de Nabahani, al-Sawa‘iq al-Muhriqah de Ibn Hajar entre autres.
Par conséquent, selon cette série de hadith, l’appel au guidance par les gens de la maison du Prophète est une nécessité extrême.
Note: La tradition de Thaqalayn est mentionnée aussi bien dans les sources Chiites que Sunnites. Elle est donc agréée par tous les Musulmans. Cependant, il y a une version du hadith dans lequel on a cité le Prophète dire «ma sounnah» au lieu de «gens de ma maison». On ne trouve cette version que dans certains livres Sunnites. A condition qu’on puisse authentifier aussi cette version, il n’y a pas de difficulté à comprendre ce que dit cette tradition. Le Prophète, dans beaucoup de traditions racontées par tous les Musulmans, a dit: «Je vous laisse deux choses précieuses qui sont le Glorieux Coran et les gens de ma maison». Dans quelques traditions racontées seulement par un groupe particulier de Musulmans, il a dit:«… le glorieux Coran et ma Sounna…». Evidemment le résultat serait que, comme une part de la comparaison est la même, c'est-à-dire le Coran, l’autre part devrait aussi être identique. Par conséquent, ‘ma Sounna’ et ‘les gens de ma maison’ doivent aussi être identiques, autrement on pourra dire qu’il n’y a pas d’harmonie dans ce que dit le Prophète. Donc, le fait d’avoir recours aux enseignements et conseils des gens de la maison du Prophète est la même chose qu’avoir recours à la Sounna du Prophète. Ainsi la seule façon pour atteindre et comprendre la Sounna du Prophète était de se référer à ces gens qui avaient des relations très proches avec lui et qui savaient mieux que quiconque ce qu’il disait, faisait ou approuvait.
L’autre question concerne la signification exacte de “gens de la maison”. Selon de nombreuses traditions, on nous dit de se référer aux gens de la maison du Prophète: «Ahloul Bayt» ou «Itrah». A quoi se réfèrent ces termes? Il n’y a aucun doute sur la position des gens de la maison du Prophète en Islam, mais il serait nécessaire d’étudier l’étendue de ce terme pour voir s’il inclut tous les parents (famille) du Prophète ou non. Naturellement, il n’y a aucun doute parmi les Musulmans que certainement Fatimah, la fille du Prophète, Imam Ali, et leurs fils Imam Hassan et Imam Houssein étaient des membres de la maison du Prophète. Ce qui nous intéresse est de savoir si les autres parents (famille) du Prophète en font partie ou pas, et si oui, jusqu’à quelle limite.
Les Musulmans Sunnites croient que tous les parents du Prophète y sont compris. Bien sûr ils excluent ceux qui n’ont pas embrassé l’Islam, tels que Abou Lahab, l’un des oncles du Prophète et en même temps l’un de ses plus hostiles ennemis qui fut courroucé dans le Saint Coran. Les Musulmans Chiites croient que les ‘Ahloul Bayt’ sont ceux qui ont un niveau de foi et de connaissance approprié qui les rend dignes d’être mentionnés avec (en comparaison) le Coran dans la tradition du Thaqalayn et d’autres. Plus précisément, ils croient que le Prophète a lui-même clairement définit qui sont les ‘Ahloul Bayt’.
Dans ce qui suit, je vais mentionner quelques hadiths rapportés de source Sunnite:
1-Les Musulmans rapportent de ‘Ayishah’ Oummoul Mo’minine:
Le Prophète sortit portant un manteau noir en laine, quand Hassan le fils de Ali arriva vers lui, et le Prophète le laissa entrer sous le manteau. Puis Houssein arriva et y entra. Puis Fatima vint et y entra aussi, puis Ali de même. Ainsi le manteau couvrit le Prophète, Ali, Fatimah, Hassan et Houssein. Puis le Prophète récita: «Allah ne veut que vous débarrasser de toute souillure, ô gens de la maison [du prophète], et vous purifier pleinement.» [4] (33:33)
2- Les Musulmans racontent de Sa’d b. Abi Waqqas que Mou’awiyah lui demanda pourquoi il refusait de courroucer verbalement Ali. Sa’d a répondu:
«Je me rappelle trois paroles du Prophète sur Ali qui m’interdisent de dire du mal de lui. Si je possédais ne serait-ce qu’une de ses qualités, ce serait mieux pour moi que des chameaux rouges. [5] Le premier est que lorsque le Prophète voulait aller en bataille de Tabuk, il laissa Ali à Madina. Ali fut très triste de n’avoir pas la chance de joindre l’armée et de se battre pour le plaisir de Dieu. Il est allé voir le Prophète en disant «Vous me laissez avec les enfants et les femmes?». Et au Prophète de répondre «N’êtes vous pas heureux d’être pour moi comme l’était Aaron pour Moise, sauf qu’il n’y aura plus de prophète après moi.» Le deuxième est que j’ai entendu du Prophète le jour de la conquête de Khaybar: «Certainement je donnerai l’étendard (de l’Islam) à un homme qui aime Dieu et Son Messager et il est aimé par Dieu et Son Messager». Nous espérions avoir l’étendard, mais le Prophète a dit: «Appelez Ali pour moi», Ali est arrivé souffrant de douleur dans les yeux. Le Prophète lui donna l’étendard et de ses mains Dieu nous accorda la victoire. Le troisième, quand le verset de Moubahalah fut révélé, le Prophète appela Ali, Fatimah, Hassan et Houssein et dit «Mon Seigneur, voici les gens de ma maison». [6]
3- Imam Ahmad b. Hanbal raconte de Anas b. Malik que quand le verset du Tathîr (33:33) fut révélé, pendant six mois le Prophète appelait à la maison de Ali et Fatima chaque matin sur son chemin vers la mosquée pour la Prière de l’Aube en disant «Prière, O gens de la maison! Allah ne veut que vous débarrasser de toute souillure, ô gens de la maison [du prophète], et vous purifier pleinement» (33:33). [7]
;Il y a aussi les traditions sur la signification de Qourbà (proches) qui a été mentionnée plusieurs fois dans le Coran. Par exemple, selon le Coran, le Prophète n’a demandé aucun salaire en retour des enseignements aux gens. Il voulait seulement que les gens aiment ses Qourbà pour leurs propres bénéfices. Alors qui sont les Qourbà? Zamakhshari, un grand érudit Sunnite et exégète du Coran dit que lorsque ce verset fut révélé, on a demandé au Prophète qui étaient indiqués par ce verset et envers qui on devait être respectueux. Le prophète a répondu:«Ali, Fatimah et leurs deux fils». [8]
Les Chiites croient que la raison est la source de connaissance digne de foi et en complète harmonie avec la révélation. Selon certains hadiths, Dieu a deux preuves (Houjjat) par lesquelles les humains peuvent comprendre Sa Volonté. Celle qui est interne est la raison (al ‘aql) et celle qui est externe ce sont les prophètes. Parfois la raison est appelée «le prophète interne» et les prophètes sont appelés «la raison externe». Il y a une règle établie parmi les juristes chiites, que quelque soit le jugement fait par la raison il est le même que celui fait par la religion (shar’) et vice versa. Il est unanimement accepté qu’une des conditions de la responsabilité morale ou légale est la pleine possession de sa raison. Si quelqu’un est aliéné, il n’est pas considéré comme étant responsable de ses actes. Ce qu’on attend des gens dans la religion varie aussi selon leur capacité mentale et rationnelle. Ceux qui sont très futés et intelligents sont sensés être plus préparés, pieux et obéissants que ceux qui sont maladroits ou ignorants.
Selon le Coran, Allah demande à tous les êtres humains de faire preuve de leur faculté rationnelle pour réfléchir à Ses signes et communication dans l’univers. Dans beaucoup d’occasions les mécréants sont condamnés à cause de leur échec à réfléchir ou à agir selon les exigences rationnelles. Par exemple, ils sont condamnés à cause de leurs imitations aveugles sur leurs ancêtres, et il y a beaucoup de versets avec des questions rhétoriques telles que «ne réfléchissent ils pas?»(36:68), «Ne méditent ils pas sur le Coran?» (4:82; 47:24) Et «En cela il y a des signes pour ceux qui réfléchissent» (13:4; 16:67; 30:28).
;En général, la raison contribue aux études religieuses dans trois domaines majeurs: Le premier est dans la compréhension des réalités du monde, telle que l’existence de Dieu, la vérité de la religion et des faits scientifiques. Le deuxième est dans l’introduction des principes des valeurs morales et des normes légales telles que le mal de l’oppression et le bien de la justice. Le troisième dans l’organisation des standards et les procédures logiques du raisonnement et déduction. Tous ces trois rôles de la raison sont reconnus, et en réalité, recommandés par l’Islam.
Par contre, le rôle de la révélation ou des Saintes Ecritures dans la religion peut être résumé comme suit:
Ø La confirmation des faits qui sont déjà connus par la raison
Ø L’introduction des sujets nouveaux qui ne sont pas connus de la raison, tels que les détails de la résurrection et des comptes détaillés des systèmes moraux et légaux
Ø L’Etablissement des sanctions par le biais du système religieux des récompenses et punitions.
Pour finir, je dois mentionner qu’il n’y a rien d’irrationnel en Islam. Bien sûr, on doit distinguer entre les jugements rationnels décisifs et certains, et ses suppositions ou opinions personnelles. S’il y a un cas où il semble que le jugement rationnel est en conflit avec des positions religieuses sûres, l’on doit admettre qu’il doit y avoir une erreur au moins de l’un des deux côtés: soit ce n’était pas un vrai jugement de raison, soit ce n’était pas une loi religieuse. Dieu ne trompe jamais les gens en leur disant de faire quelque chose par Ses prophètes, et le contraire de cette chose par la raison qu’Il nous a donnée. Il y a toujours eu des jugements attribués à la raison et pris comme contraires aux positions religieuses qui après mûres considérations ont prouvé être contraires aux prémisses rationnelles décisives.
Par tradition, une des sources pour la compréhension de l’Islam est le Consensus (Ijma’). Selon la méthodologie chiite de pensée, le consensus des gens ou un groupe d’entre eux tels que les érudits par eux mêmes, n’est pas suffisant comme une preuve (loujja); car si une personne peut se tromper; deux, trois, ou mille, ou même tout un groupe peut se tromper. Cependant, quand il y a un accord parmi tous les Musulmans ou érudits Musulmans de manière que l’accord correspond à la Sounna, il peut servir comme preuve, comme un moyen pour découvrir la volonté de Dieu. Par exemple, quand nous trouvons que chaque Musulman du temps de Prophète récitait ses prières d’une certaine manière, nous nous rendons compte que le Prophète leur a instruit de le faire ainsi; autrement il n’y aurait aucun facteur pour unifier leur action. Il n’est pas possible d’imaginer qu’ils aient tous agi aveuglement et sans aucune instruction, ou qu’ils se soient tous trompés et que le Prophète ne leur ait pas corrigés.
Ainsi, pour les chiites le consensus n’est pas en lui même une preuve. Il peut être valable s’il conduit à découvrir la Sounna. En conséquence, si des Musulmans sont aujourd’hui d’accord sur un sujet donné, alors qu’un érudit a des doutes sur le jugement islamique concernant ce sujet, il ne peut dire méthodiquement que puisque tout le monde dit ainsi, je vais aussi dire la même chose. Il y a eu beaucoup de cas dans l’histoire où tous les êtres humains ont cru d’une même manière et puis plus tard ils ont découvert qu’ils s’étaient trompés, par exemple la terre étant plate. Il n’y a que Le Coran et la Sounna qui sont incontestablement vrais et exempts de toute erreur. Cette approche garantit une sorte de dynamisme à la pensée chiite, de telle sorte que chaque génération d’érudits et même un seul érudit est capable, et réellement exigé, de se référer directement au Coran et à la Sounna et de mener son propre ijtihàd original, qui est son investigation et jugement indépendant. Ijtihàd n’a jamais été interdit ni abandonné dans le monde chiite. Les chiites croient que le point de vue d’aucun juriste, même si sa position est élevée, n’est pas exempt d’interrogation ou de défit scientifique. Bien sûr, comme dans les autres disciplines, chaque chercheur religieux a besoin de consulter et examiner soigneusement les travaux de ses prédécesseurs.