Comment tirer parti du Coran ?

Le Coran est un livre dont il faut tirer parti. Le Prophète, que le salut de Dieu soit sur lui et sur ses descendants, le dit à maintes reprises. Or ce à quoi il faut prêter attention est que l'usage du Coran comporte des degrés que tout musulmans doit détenir en lui.

Le premier degré consiste à bien en connaître la lecture, à le déchiffrer correctement. Le Coran contient un verset qui est unique entre tous par son insistance sur ce point: "Récitez du Coran ce qui vous sera facile. (Dieu) sait qu'il y aura parmi vous des malades, et d'autres qui parcoururent la terre en quête de la grâce de Dieu, et d'autres encore qui combattront dans le chemin de Dieu. Récitez-en donc ce qui vous sera facile..."

Récitez le Coran autant que vous le pourrez, dit-il donc. Dieu sait que vous êtes parfois malades; pourtant, même dans cet état, récitez le Coran autant que vous le pourrez. Dieu sait que les préoccupations de ce monde vous assaillent, que vous êtes fort occupés; récitez néanmoins du Coran ce qui vous sera facile. Dieu sait que vous êtes parfois en première ligne du front: là encore, récitez-en ce que vous pourrez. Nous n'avons pas de verset coranique qui ait insisté à ce point sur une question quelconque.

Par conséquent, le premier degré, nécessaire et obligatoire pour tout musulman, est de bien lire le Coran et de le lire beaucoup. L'Imam Khomeiny était ainsi. Même dans les derniers temps où il était fort occupé, chaque matin lorsqu'il recevait des visiteurs, le Coran était à ses côtés. Lorsqu'une visite s'achevait et que les gens partaient, cinq minutes s'écoulaient avant la visite suivante, et durant ces cinq minutes, il prenait le Coran et le lisait. Lorsqu'il était inactif, il lisait le Coran.

Il est honteux pour un jeune musulman d'avoir le baccalauréat et de lire le Coran avec des fautes. C'est comme de lui tourner le dos.

Tel est le premier degré d'utilisation du Coran. A l'aube de l'islam, le Prophète, que le salut de Dieu soit sur lui et sur ses descendants, avait coutume de recommander quiconque devenait musulman à quelqu'un qui lui énonce les questions religieuses et lui enseigne le Coran. Si lors de la guerre de Yamama soixante-dix (ou sept cents) Hafiz du Coran furent tués, c'est parce que la plupart des musulmans de cette époque étaient Hafiz du Coran. Or on s'étonne aujourd'hui d'entendre qu'un tel connaît le Coran par cœur. C'est effectivement étonnant, et il convient de l'en féliciter. Mais nous prétendons qu'un étudiant en sciences religieuses se doit d'être Hafiz du Coran, et c'est donc la moindre des choses qu'il puisse le lire correctement. Un musulman qui lit le Coran en faisant des fautes souffre d'une carence islamique, et il faut dire en toute expliciter que c'est une honte. Veillez à ne pas avoir de motif de honte islamique.

Le second degré d'utilisation du Coran est le commentaire. Cette investigation dans le Coran. C’est le Coran lui même qui la requiert, et qui la requiert même sérieusement. Le verset qui concerne la méditation à propos du Coran est justement sans pareil lui aussi: "Ne méditeront-ils pas le Coran? Où sont-ce des cœurs à serrures?"

La communauté, l'individu qui, bien que sachant lire, ne médite pas à propos du Coran a apposé sur son cœur, la serrure de la négligence (ghiflat), si ce n'est pas la serrure de la mécréance et de la dissension. Nous nous devons tous de méditer à propos du Coran, et cette méditation comporte des degrés:

1. Connaître au minimum la traduction du Coran, et comprendre ce que nous disons lorsque nous le lisons.

2. Etre familiarisé, chacun à son propre mesure, avec le commentaire coranique.

3. Appréhender la saveur du Coran, comme le fit Allameh Tabâtabâï. Ce qui fait l'honneur d'Allameh Tabâtabâï n'est pas d'avoir écrit un commentaire coranique, lequel commentaire fait l'honneur du monde islamique. Ce qui fait son honneur est d'avoir appréhendé la saveur du Coran -c'est en cela que consiste le commentaire verset par verset. Il savait quelle était la saveur du Coran et le commentait d'après cette saveur. Cela n'est pas donné à tout le monde, cela requiert de la piété, de l'ascétisme, mais quoi qu'il en soit, c'est là l'ultime degré de la méditation coranique.

Le troisième degré d'utilisation du Coran est de tirer profit de l'éthique coranique. Le Coran est livre d'ethnique (akhlâq), et plus de deux tiers de son contenu s'y réfère, directement ou indirectement. Le Coran dispose d'une méthode de moralisation spécifique, désignée sous le nom de morale pratique. Il exprime ce qu'il veut exprimer grâce à un récit, une anecdote. Ce n'est pas notre propos ici de parler de cette méthode et nous nous contenterons de dire que le Coran est livre d'éthique et zikr (Rappel de Dieu): il faut en tirer profit pour l'édification de soi, tirer profit de sa morale. C'est le meilleur des livres d'éthique. Le verset "Et très certainement Nous avons rendu le Coran facile au Rappel. En est-il un qui se rappelle?" est répété à plusieurs reprises dans la sourate La Lune, comme si le Coran implorait: Veux-tu être rappelé (à l'ordre)? Veux-tu relever de l'Ethique Divine?

Le quatrième et ultime degré d'utilisation du Coran est de tirer profit de la guidée et de la lumière de vérité coraniques.

Le premier, second et troisième degrés sont donnés à ceux qui ont à faire avec le Coran. Mais le quatrième degré n'est pas donné à tout un chacun. A qui est-il donc accordé? "Voici le Livre! Il ne renferme aucun doute. Guidée pour les pieux..."

Il s'agit là d'une guidée particulière dont il est dit dans un autre verset: "...Vous sont venus de Dieu une lumière et un livre clair. Par ceci, Dieu guide aux chemins de salut ceux qui suivent Son agrément. Il les fait sortir des ténèbres vers la lumière, de par Sa permission, et les guide vers un droit chemin".

Le Coran est donc guidé pour celui dont Dieu est satisfait et qui est satisfait de Dieu, et le guide vers les chemins de salut (souboulous-salam). Or ces chemins de salut ne désignent pas l'islam en soi, car il dit ensuite: "Il les fait sortir des ténèbres vers la lumière, de par Sa permission, et les guide vers un droit chemin." Il apparaît donc qu'il y a dans l'islam des chemins appelés chemins de salut, accordés aux pieux (mouttaqines).

Je me souviens du défunt Karbala'i Kâzem Arâki. Il vint à Qom au début de mes études religieuses. C'était un vieil homme candide, hafiz du Coran. ( ... ) Les étudiants voulurent le mettre à l'épreuve. On lui tendit un volume du Jawahir en lui disant: "Tiens. Lis un peu le Coran." Il était analphabète, il ne connaissait même pas l'alphabet, mais il était un étonnant Hafiz du Coran. Dès qu'il eut ouvert le Jawahir, il dit: "Ce n'est pas le Coran." Or l'auteur du Jawahir s'était justement référé à un verset coranique pour énoncer son propos. Karbala'i Kâzem le montra du doigt: "Ça, c'est le Coran"- "Comment le sais-tu?" lui demanda-t-on. "Je reconnais le Coran à sa lumière. répondit-il. Je discerne qu'un écrit est le Coran lorsqu'il a de la lumière"...

"Vous sont venus de Dieu une lumière et un livre..." Quel cœur faut-il avoir pour tirer profit de la lumière du Coran, pour voir cette lumière! Quel cœur faut-il avoir pour que brille en lui la vérité du Coran, pour bénéficier de la guidée du Coran! "Ceci est certes une noble lecture, dans un livre bien gardé, que seuls touchent les purifiés."

Par conséquent, quiconque veut atteindre ce quatrième degré d'utilisation du Coran doit se purifier, acquérir la piété, extirper les défauts de son cœur. S'il pénètre alors le Coran, il verra sa lumière, comprendre sa vérité, bénéficiera de sa guidée. C'est alors que Dieu tire l'homme des ténèbres vers la lumière et le guide vers un chemin droit.

Préoccupons-nous du Coran plus que nous ne le faisons. Que celui qui aspire au bonheur en ce monde et dans l'Au-delà lise le Coran et le lise beaucoup, qu'il médite à son propos; qu'il s'auto édifie par lui et tire profit de sa lumière, de sa réalité, de sa vérité, de sa guidée. Qu'il apprête son cœur et la lumière du Coran y brillera. On peut être totalement analphabète tout en étant Hafiz du Coran, comme Karbala Kâzem, et tirer profit de la lumière coranique.

D'après discours de l'Ayatollah Mazâheri