Si mon ami plein de douceur me fait asseoir dans la poussière,
Pourquoi s’affligerait un pauvre hère qui possède un puissant Ami ?
Le chagrin qu’il me cause est dans mon cœur comme un trésor,
Mon cœur est "Lumière sur lumière",
Pareil à la belle Maryam qui porte en son sein Jésus.
Mon ami est le soleil, il ne se promène que seul ;
C’est la lune qui est à la tête de l’armée des étoiles
(Jalâl-ud-Dîn Rûmî, Dîwân-e Shams-e Tabrîzî, Ode 565)
Prophète central de l’islam, Jésus - appelé "’Isâ" dans le Coran - fait partie, avec les prophètes Noé, Abraham, Moïse et Mohammad, des "élus" à qui a été révélé un Livre ou une Loi divine. [1] Dans l’islam, Jésus a donc été choisi par Dieu pour transmettre aux hommes un nouveau texte sacré, l’Evangile (Injîl), censé contenir le sens profond et vrai de la Thora, ainsi que pour rappeler aux "Enfants d’Israël" (Banî Isrâ’îl) le dogme central du monothéisme et la nécessité de se soumettre à la volonté divine.
Jésus est évoqué dans le Coran comme indissolublement lié à Marie et constitue un modèle à suivre pour l’ensemble des croyants : "Ô Marie ! Dieu t’annonces la bonne nouvelle d’un verbe émanant de Lui. Son nom est : le Messie, Jésus, fils de Marie (Al-Masîh, ’Isâ ibn Maryam) ; illustre en ce monde comme dans l’au-delà ; il est au nombre de ceux qui sont proches de Dieu." [2] Il fait partie de la "famille de ’Imrân" comprenant sa mère Marie, Yahyâ (Jean-Baptiste), son cousin, ainsi que le père de ce denier, Zacharie. Jésus est également considéré pur de tout péché.
Le ’Isâ de l’islam est cependant très différent du Jésus du christianisme : bien que favorisé de grands dons et "fortifié par l’Esprit Saint", la vision coranique le considère essentiellement comme un homme et lui dénie donc la part de divinité qui constitue le fondement de la religion chrétienne. Ainsi, dans une optique comparée, la vision et conception profondément différente du monothéisme ainsi que de la relation entre Dieu et les hommes dans ces deux religions apparaît avec toute sa force au travers de leur différente vision du personnage de Jésus. Cependant, dans les deux traditions, il n’en demeure pas moins le prophète qui bouleverse les lois, tant par sa naissance et sa mort que par la profondeur de son message, et qui a constitué une source inépuisable de méditation pour de nombreuses grandes figures de l’islam au cours des siècles.
Nous ne savons pas avec précision dans quelle mesure le prophète Mohammad lui-même connaissait le personnage de Jésus et les différents aspects de la doctrine chrétienne de l’époque, qui, à la fin du VIe siècle, était loin d’être unifiée. La révélation coranique s’est ainsi déroulée dans un contexte où foisonnaient une multitude de communautés chrétiennes - nestoriens, priscilliens, monophysites… - ayant notamment des conceptions différentes de la nature de la personne du Christ lui-même.
Selon certains éléments de la tradition islamique, le prophète Mohammad se serait trouvé au contact de plusieurs chrétiens tels que le moine nestorien Bahîra - qui, alors que Mohammad n’était encore qu’enfant, le reconnaît comme un futur prophète [3] -, Waraqa ibn Nawfal, chrétien parent de sa femme Khadîja qui lui apportera la confirmation de sa mission prophétique, ou encore Salman de Perse, qui se convertira à l’islam et fut l’un de ses plus proches compagnons.
A l’époque de la Révélation, l’Arabie entretenait également des relations avec les chrétiens monophysites du Najrân au Yémen [4], les Lakhmides nestoriens de Hira, et certaines communautés chrétiennes de Syrie. En outre, au temps des persécutions des compagnons de Mohammad à la Mecque, ce dernier les invita à se réfugier en Abyssinie, auprès du roi chrétien Négus qui, touché par le respect et la haute estime accordés à Jésus et Marie dans le Coran, décida de leur accorder protection et soutien.
Tantôt qualifié de Parole de Vérité (Qawl al-Haqq), d’Esprit de Dieu (Rûh Allah), de serviteur de Dieu (’Abdullah) ou encore de "signe pour l’Heure" (’ilm lilsa’ât) et de "Masîh" (signifiant le "oint") [5], le Coran présente également Jésus comme le "Verbe" (Kalima) de Dieu - dont la signification est cependant bien différente de la notion de "Verbe" de l’Evangile de Saint Jean selon lequel Dieu s’est fait chair. Pour l’islam, le Verbe reste une créature, même s’il n’en demeure pas moins doté d’un rang éminent en ce qu’il est chargé de véhiculer la Parole de Dieu et parler en son nom : "Jésus devient le Verbe de Dieu non pas à cause de son incarnation par laquelle sa chair devient divine, mais parce que son esprit est parvenu à un tel degré de perfectionnement qu’il est devenu un miroir au travers duquel la divinité se révèle". [6]
La dimension exceptionnelle de la naissance virginale de Jésus est soulignée par le fait que Jésus a été conçu par le souffle de l’Esprit divin (Rûh) [7] insufflé en Marie. Le mystère de sa conception a parfois été comparé à celle d’Adam, créés tous deux par la Parole divine existentiatrice "Soit" (Kun !) [8], avec cependant pour différence essentielle qu’Adam n’eut pas de mère. Le miracle de la naissance de Jésus est renforcé par le caractère extraordinaire du nouveau-né qui parle dès sa naissance [9] et répond aux accusations lancées contre sa mère : "Je suis vraiment le serviteur de Dieu. Il m’a donné le Livre et m’a désigné Prophète. Où que je sois, Il m’a rendu béni ; et Il m’a recommandé, tant que je vivrai, la prière et la Zakat ; et la bonté envers ma mère. Il ne m’a fait ni violent ni malheureux." [10]
Comme le prophète Mohammad après lui, Jésus Isâ ne vient pas apporter un nouveau message, mais davantage confirmer les révélations précédentes et inviter les hommes au monothéisme pur, dans la continuation de Noé, d’Abraham et de Moïse. Il confirme ainsi le message de la Torah, tout en modifiant certaines de ses prescriptions légales. En outre, le Coran évoque que Jésus fut aidé par l’Esprit Saint (Rûh al-Qudus) [11] ainsi que par un groupe de "disciples" (hawâriyûn). C’est également à la demande de ces derniers que Jésus demande à Dieu de faire descendre du ciel une "table servie" (mâ’ida) [12] - qui rappelle aux commentateurs tantôt l’épisode de la Cène, tantôt celui de la multiplication des pains - comme ultime preuve de la véracité de sa prophétie. Ainsi, si le contenu de cette dernière fut rejeté par une grande partie des Juifs (Banî Isrâ’îl), seuls les apôtres (hawâriûn) ont réellement "crû" à l’issu de l’envoi de ce signe du ciel. Dieu a également donné à Jésus la capacité de réaliser des miracles "par sa permission", notamment de guérir les malades ou de donner vie à des formes inertes : "Tu fabriquais de l’argile comme une forme d’oiseau par Ma permission ; puis tu soufflais dedans. Alors par Ma permission, elle devenait oiseau. Et tu guérissais par Ma permission, l’aveugle-né et le lépreux. Et par Ma permission, tu faisais revivre les morts." [13]
Concernant la conception même de la personne du Christ, toute idée d’incarnation ou de divinité est fermement rejetée. Nous touchons ici au cœur même de l’islam qui insiste avant tout sur l’idée d’unicité (tawhîd), d’unité et de transcendance divine absolue, proscrivant ainsi formellement toute idée d’association (shirk) entre Dieu et ses créatures. [14] Malgré son statut d’élu et de messager, le Christ reste donc avant tout un homme, dont l’existence est sans commune mesure avec l’essence divine. Cette différence essentielle est clairement exprimée dans le Coran qui rapporte les paroles du Christ à son Créateur : "Tu sais ce qu’il y a en moi, et je ne sais pas ce qu’il y a en Toi. Tu es, en vérité, le grand connaisseur de tout ce qui est inconnu." [15] Isâ se présente également comme un serviteur de Dieu (’abd) et se défend d’être à l’origine de tout associationnisme : "Je ne leur ai dit que ce que Tu m’avais commandé, (à savoir) : "Adorez Dieu, mon Seigneur et votre Seigneur"". [16] La figure de Jésus Isâ telle qu’elle est présentée dans le Coran souligne la centralité de la transcendance du divin en islam, qui ne peut en aucun cas s’incarner dans l’histoire et être appréhendé en soi au travers des notions de matérialité ou de corporéité.
Comme nous l’avons évoqué, il fut révélé à Jésus un Evangile (Injîl) [17] qualifié par le Coran de "guide et lumière" [18] et censé contenir le sens vrai de la Thora. Cependant, le texte original fut ensuite perdu et son application dévoyée : "Nous […] lui avons apporté l’Evangile, et mis dans les cœurs de ceux qui le suivirent douceur et mansuétude. Le monachisme qu’ils inventèrent, Nous ne le leur avons nullement prescrit. [Ils devaient] seulement rechercher l’agrément de Dieu." [19] Le sens et le contenu du mot "évangile" font donc référence à deux réalités fondamentalement différentes dans la chrétienté et en islam : recueil de témoignages écrits plusieurs décennies après la mort du Christ pour le christianisme, l’Injîl lui fut au contraire directement révélé par Dieu de son vivant selon l’islam.
Il faut néanmoins relever certaines similitudes, comme ce verset du Coran indiquant que l’Injîl présente les vrais croyants comme "une semence qui sort sa pousse, puis se raffermit, s’épaissit, et ensuite se dresse sur sa tige, à l’émerveillement des semeurs" [20] ; faisant ainsi écho à certains passages de l’Evangile selon Saint Matthieu : "Celui qui a reçu la semence dans la bonne terre, c’est celui qui entend la parole et la comprend ; il porte le fruit, et un grain en donne cent, un autre soixante, un autre trente" [21] ; "la bonne semence, ce sont les fils du royaume ; l’ivraie, ce sont les fils du malin". [22]
Le Christ est également considéré par l’islam comme l’annonciateur de la venue du prophète Mohammad. [23] Cette vision s’appuie notamment sur une lecture particulière des paroles du Christ rapportées dans l’Evangile selon Saint Jean, annonçant la venue d’un "Paraclet" : "J’ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pouvez pas les porter maintenant. Quand le consolateur sera venu, l’Esprit de vérité, il vous conduira dans toute la vérité (Jean, 16:12-13).
L’authenticité de la traduction chrétienne courante évoquant un "consolateur" (du grec parakletos) est contestée par les musulmans qui considèrent que le mot grec original était periklytos, signifiant "glorieux", "plus loué" ou encore "Ahmad" en arabe, provenant lui-même de la racine "h-m-d", évoquant l’idée de louange et de glorification, et à partir duquel est formé le nom de "Mohammad". Cette interprétation est selon eux confirmée par la seconde partie de la parole du Christ qui poursuit : "car il ne parlera pas de lui-même, mais il dira tout ce qu’il aura entendu, et il vous annoncera les choses à venir" (Jean, 16:13) ; ce qui s’accorde totalement avec la révélation coranique qui fut "dictée" à Mohammad par l’intermédiaire de l’Ange Gabriel et comporte une dimension eschatologique essentielle. La continuité des prophéties christique et mohammadienne, expressément affirmée dans le Coran, est, selon les musulmans, également énoncée par le Christ à la suite des paroles que nous venons de rapporter : "Il me glorifiera, parce qu’il prendra de ce qui est à moi, et vous l’annoncera", (Jean, 16:15).
Selon l’islam, le Christ ne serait pas mort sur la croix : un sosie lui aurait été substitué peu avant la crucifixion, tandis que, comme les prophètes Hénoch et Elie, il serait monté au ciel vivant : "Ils ne l’ont ni tué ni crucifié ; mais ce n’était qu’un faux semblant. […] Dieu l’a élevé vers Lui." [24] Le Christ a cependant un rôle eschatologique essentiel en ce qu’il doit revenir à la fin des temps au côté du "mahdî" pour rétablir le règne de la justice et vaincre l’Antéchrist. [25] Cependant, à la différence du christianisme, l’islam ne considère pas le Christ comme un sauveur, étant donné qu’il ne reconnaît pas la notion d’Alliance ni de péché originel et que la rédemption ne s’obtient qu’au travers des efforts de chaque croyant pour suivre les préceptes révélés dans le Coran. L’essentiel des dogmes chrétiens (divinité du Christ, incarnation, Trinité, crucifixion, rémission des péchés) est donc rejeté. [26] Malgré ces différences, ces deux traditions n’en partagent pas moins un horizon commun, caractérisé par une même attente eschatologique du retour de Jésus-Christ à la fin des temps.
Dans le Coran, Jésus apparaît soit sous le nom de " ’Isâ ", soit celui de "Masîh" ; or, le Jésus des chrétiens arabes se nomme Yasû’, lui-même issu de l’hébreu Yéshû’, diminutif de Yéhôshûa (Josué) signifiant "Dieu sauve". Yasû’ viendrait donc de la racine Yâsha’, "sauver", distincte de la racine de ’Isâ, dont l’origine et la signification demeurent incertaines. [27] Certains ont évoqué une simple déformation du nom par déplacement du ’ayn final au début du mot (métathèse) et modification de voyelle longue "û" en "â", mais qui n’en fait pas moins référence à une même personne ; cependant, l’ampleur de la transformation rend cette hypothèse douteuse. [28] François Jourdan penche pour la version selon laquelle Isâ proviendrait de ’Ysaû, nom sémitique d’Esaü, alors utilisé par les Juifs pour désigner les chrétiens. Sans rentrer dans l’ensemble des analyses linguistiques et historiques venant étayer telle ou telle affirmation, ces hypothèses n’en révèlent pas moins la difficulté à assimiler de fait le "Yasû’ " du Nouveau Testament au "Isâ " du Coran, bien que le fait qu’il y soit désigné comme "fils de Marie" nous autorise à penser qu’il s’agit bel et bien d’un même personnage.
Les nombreux récits de la tradition musulmane consacrés à Jésus insistent notamment sur sa pureté, comme ce célèbre hadîth de Bukhârî : "Lorsque chaque être humain naît, Satan touche de ses deux doigts les deux côtés de son corps, sauf Jésus, fils de Marie, que Satan n’a pas réussi à toucher, n’effleurant que le placenta." [29] De même, selon un hadîth attribué au prophète Mohammad, ce dernier aurait affirmé que "De tous les prophètes, le plus proche de moi est Jésus, fils de Marie. Il y a entre lui et moi aucun autre prophète". Le message du Christ apparaît donc comme étroitement lié à la révélation mohammadienne qui ne viendrait que l’approfondir et en restaurer le sens vrai ; Jésus et Mohammad n’étant cependant que les deux pôles d’une vérité unique. De façon générale, les chrétiens sont également considérés comme les croyants les plus proches des musulmans : "Tu trouveras certes que les plus disposés à aimer les croyants [musulmans] sont ceux qui disent "Nous sommes chrétiens". [30]
Jésus est également "présent" dans plusieurs événements de la vie du Prophète : comme le relate Martin Lings dans sa biographie consacrée au prophète Mohammad, lors de son voyage nocturne (isrâ’) suivi de son ascension céleste (mi’raj), accompagné de sa monture Burâq et de l’Archange Gabriel, "ils filèrent en direction du nord, dépassèrent Yathrib et Khaybar et parvinrent enfin à Jérusalem. Là, un groupe de prophètes - Abraham, Moïse, Jésus et d’autres - se porta à leur rencontre…" [31] Cet événement n’est bien sûr pas à situer dans le temps "historique" qui est le nôtre, mais dans le monde imaginal, lieu des évènements mystiques au-delà de toute temporalité terrestre, où, dégagées de la linéarité du temps matériel, toutes les rencontres deviennent possibles…
Dans la gnose chiite, Jésus est avant tout considéré comme une épiphanie (mazhar) de l’un des aspects de la gloire divine apparaissant dans le monde sensible sans s’y incarner, telle une image se reflétant dans un miroir sans pour autant se confondre avec lui.
L’importance de la figure du Christ est également soulignée par plusieurs Imâms dont l’Imâm Sâdiq qui aurait déclaré : "Sache que si quelqu’un renie Jésus le fils de Marie, et reconnaît tous les prophètes sauf lui, il n’est pas au nombre des croyants" [32] ; tandis que l’Imâm Bâqir va même jusqu’à s’identifier avec le Christ, en s’inspirant des versets du Coran lui étant consacrés : "Je suis le Christ qui guérit les aveugles et les lépreux, qui donne vie aux oiseaux d’argile et qui dissipe les nuées. Je suis lui et il est moi". [33] Enfin, le septième Imâm, Mûsâ Kâzim, choisit de faire figurer une partie du texte des béatitudes de l’Evangile dans son testament spirituel.
En outre, Narkès, la mère de l’Imâm du Temps, le douzième imâm chiite, était une princesse grecque chrétienne et descendante de l’un des apôtres du Christ, Simon Pierre [34]. Un jour, cette dernière voit en songe le Prophète Mohammad demander au Christ sa "fille" pour son propre fils, l’Imâm du temps : "Christ, ayant regardé longuement Simon Pierre, lui dit : "Honneur insigne et noblesse sont venus à toi. Noue donc ce lien entre ta propre famille et la famille de Mohammad". [35] Les deux prophètes ainsi que les douze apôtres et les douze imâms du chiisme duodécimain seront par la suite témoins de cette union, qui scelle également dans la conscience chiite un lien et une proximité unique entre Jésus et l’Imâm du Temps.
De façon générale et comme l’a souligné Henry Corbin dans son œuvre, l’imâmologie chiite est proche d’une certaine christologie des origines, celle des premiers siècles ayant suivi la mort du Christ ayant essentiellement développé une conception théophanique du Christ ou "Christos Angelos", présenté comme le reflet de l’un des attributs divin mais non son incarnation ; idée qui fut par la suite totalement évincée par la christologie paulinienne ayant fait prévaloir le dogme de l’incarnation. [36] Or, cette conception se rapproche de la vision chiite des Imâms conçus comme étant l’épiphanie de la "Forme" de Dieu au travers de laquelle il manifeste ses Attributs sans s’y incarner.
Jésus est une figure quasi-omniprésente de la littérature mystique musulmane où il incarne souvent l’invitation adressée à chaque homme à partir à la recherche de la part de divin cachée en lui. Etroitement liée à la figure de Maryam, le Christ typifie essentiellement la naissance spirituelle destinée à s’accomplir au sein de chaque être ; le corps devant auparavant être "purifié" de toute mauvaise pensée ou acte pour pouvoir donner naissance au "Jésus de son être". [37]
Dans ce sillage, au cours d’une réflexion sur la douleur, Mowlânâ Jalâl-od-Dîn Rûmî compare notre corps à celui de Marie, que les douleurs de l’enfantement incitèrent à se réfugier vers un palmier desséché qui porta alors ses fruits : "Le corps est pareil à Marie, et chacun possède en lui un Jésus. Si nous éprouvons en nous cette douleur, notre Jésus naîtra" [38] pour enfin conclure : "Cherche un remède tant que ton Jésus est sur la terre : une fois ton Jésus parti vers le ciel, ton remède aura disparu". La figure du Christ, symbolisant ici l’âme et la dimension spirituelle de chaque homme, souligne la nécessité de l’action dans cette vie, étant donné que l’occasion de nous perfectionner au travers nos actes ne nous sera plus donnée dans l’au-delà. Nous retrouvons la même thématique dans nombre de ses poèmes : "Si tu es à la recherche de l’âne, dans cette étable du monde, Va chercher ton âne, mais Jésus ne doit pas être cherché là. Jésus est séparé de l’âne par la lumière du cœur. [...] N’entre pas en lice avec un âne ; celui qui est monté sur l’âne." [39] ; "Le chagrin qu’il [40] me cause est dans mon cœur comme un trésor, mon cœur est "lumière sur lumière" [41], pareil à la belle Maryam qui porte en son sein Jésus." [42] Jésus est encore ici indissolublement lié à Marie, symbolisant la pureté du corps nécessaire à la naissance de l’enfant de l’âme (tefl-e jân). Le Christ incarne également la lutte et le nécessaire détachement de toute âme à la recherche de son vrai principe. [43]
Dans l’anthropologie mystique de ’Alâoddawleh Semnânî (XIVe siècle) selon laquelle l’homme possède sept organes subtils (latâ’if) correspondant à une couleur et à un prophète particulier, le "Jésus de ton être" correspond au "mystère" (khafî) de la naissance spirituelle destinée à s’accomplir dans chaque être, annonçant ainsi la venue du "Vrai Moi", ou le "Mohammad de ton être". Dans cette intériorisation de la figure christique, l’ "enlèvement au monde" de ce dernier symbolisera dès lors le retour du mystique à son Principe et son occultation au monde.
Le motif de la Croix de Lumière a également été largement évoqué par la gnose ismaélienne qui présente une vision selon laquelle la vraie croix et le vrai Christ ne sont pas à rechercher dans ce monde mais dans les profondeurs même de la conscience du gnostique.
Jésus occupe également une place centrale dans l’œuvre d’Ibn ’Arabî qui le considère comme "le sceau de la sainteté (walâyat)" [44], face à Mohammad qui est le "sceau des prophètes". L’étroite dépendance de Jésus à Marie - qui incarne la Sophia éternelle - est également largement évoquée dans son œuvre. De façon générale, le couple Jésus-Maryam a souvent été mis en parallèle avec celui de Adam et Eve, avec qui il entretient une relation d’opposition : si le Féminin a originellement été existentialisé par le Masculin sans besoin d’une mère, la naissance miraculeuse du Christ marque l’apparition du Masculin existencié par le Féminin sans recours à un père. Le féminin se voit alors conférer une dimension créatrice essentielle, qui sera à la source de tout un ensemble de réflexions gnostiques sur la notion de "Sophia" divine ou de "Féminin créateur".
Malgré les différences profondes existant entre le Christ des chrétiens et le Isâ des musulmans révélant deux différentes façons de concevoir la spiritualité et le rapport au divin, nous pouvons cependant constater certaines similitudes essentielles concernant le contenu même du message du Christ et de l’islam : le Jésus du Nouveau Testament vient prêcher l’avènement proche du royaume de Dieu, rejoignant ainsi l’une des thématiques centrales du Coran. Le message du Christ est essentiellement centré non sur la fondation d’une nouvelle religion, mais sur l’accomplissement de la Loi de Moïse, faisant écho à la nécessité d’un retour au monothéisme pur d’Abraham dans le Coran qui se définit essentiellement comme un "rappel". Enfin, l’appel coranique à une soumission à Dieu ainsi que la nécessité de renoncer à tout bien matériel et même à ses attaches familiales n’est pas sans rappeler certains passages centraux de l’Evangile : ainsi, le verset "Les hommes sont irrésistiblement attirés, dans leurs passions trompeuses, par les femmes, les enfants, les amoncellements d’or et d’argent, les chevaux de race, les troupeaux et les champs. C’est là une jouissance éphémère de la vie d’ici-bas, mais c’est auprès de Dieu que se trouve le meilleur séjour." [45] fait écho à ce passage de l’Evangile de Saint Matthieu : "Et quiconque aura quitté, à cause de mon nom, ses frères, ou ses sœurs, ou son père, ou sa mère, ou sa femme, ou ses enfants, ou ses terres, ou ses maisons, recevra le centuple, et héritera la vie éternelle." [46]
Cependant, contrairement au christianisme où l’éradication des mouvements gnostiques des premiers siècles après Jésus-Christ et les différents Conciles ont donné lieu à l’émergence d’une définition "officielle" de la nature du Christ, l’absence d’un magistère dogmatique unique en islam a favorisé un véritable foisonnement de la conscience gnostique ainsi que la multiplication des réflexions sur les différentes dimensions théophaniques et mystiques du Christ. Jésus s’affirme donc en islam comme un prophète qui sauve non au travers de sa crucifixion, mais en incarnant lui-même la parole de Dieu, et en invitant chacun à la suivre : "Il faut achever la marche d’Abraham ; c’est cela entendre les verset qorâniques "par le Jésus de ton être", et c’est te mettre en mesure, toute vaine gloire bannie de ta pensée quand s’épiphanise la Lumière sacro-sainte, de répondre toi aussi par les mots mêmes que Jésus prononce dans le Qorân : "Tu sais ce qu’il y a au fond de moi-même, mais je ne sais pas ce qu’il y a en Toi. Car c’est Toi qui connais les mystères"". [47]
Bibliographie Anawati, Georges C.,"Isâ", Encyclopaedia of Islam Online, Brill Academic Publishers. Brague, Rémi, Du Dieu des chrétiens et d’un ou deux autres, Flammarion, 2008. Corbin, Henry, En islam iranien, aspects spirituels et philosophiques, T. 1, 3 et 4, Gallimard, 1971. Corbin, Henry, L’Imagination créatrice dans le soufisme d’Ibn ’Arabî, Entrelacs, 2006. Gloton, Maurice, Une approche du Coran par la grammaire et la langue, Albouraq, 2002. Ibn ’Arabî, Le livre des chatons de la sagesse (Fosûs al-Hikam), traduction en français de Charles-André Gilis, Albouraq, 1999. Jourdan, François, Dieu des chrétiens, Dieu des musulmans, des repères pour comprendre, Editions de l’Œuvre, 2007. Khalidi, Tarif, the Muslim Jesus: sayings and stories in Islamic literature, Harvard University Press, 2001. Lehenhausen, Muhammad (trad.), Jesus through Shiite narration, selected by Mahdî Muntazir Qâ’im, Ansaryan Publication 2004. Lings, Martin, Le prophète Muhammad, Seuil, 2002. Rûmî, Jalâl-ud-Dîn, Le livre du dedans (Fihi-mâ-fîhi), traduit du persan par Eva de Vitray-Meyerovitch, Albin Michel, Spiritualités Vivantes, 1997. Rûmî, Jalâl-ud-Dîn, Odes mystiques (Dîwân-e Shams-e Tabrîzî), traduit du persan par Eva de Vitray Meyerovitch et Mohammad Mokri, Points, Sagesses, 1973. Urvoy, Marie-Thérèse, article "Jésus" in Amir-Moezzi, Mohammad Ali (dir.), Dictionnaire du Coran, Robert Laffont, 2007.
Notes[1] Ces prophètes sont appelés "ulû’-l-’azm", ou hommes de la décision. Certaines traditions incluent également David et son psautier.
[2] (3:45).
[3] Bahîra aurait ainsi reconnu le "Sceau de la Prophétie" ou "marque du Prophète" sur l’épaule du prophète Mohammad enfant.
[4] Le prophète Mohammad signa un pacte avec cette communauté, fondant ainsi leur protection et leur droit en tant que minorité en terre musulmane. Ceci permettra par la suite de fonder le statut de "protégé" (dhimmi) ayant permis au cours des siècles suivants une riche - et souvent trop rare - coexistence entre les "religions du livre", notamment au Maghreb, en Espagne, en Mésopotamie, en Syrie…
[5] La signification de "masîh" comme "oint" est distincte de celle du christianisme, étant donné qu’il est dénié à ’Isâ toute nature divine. "Masîh" n’en provient pas moins de la racine arabe "m-s-h" signifiant "oindre d’huile", provenant elle-même de l’hébreu.
[6] Lehenhausen, Muhammad (trad.), Jesus through Shiite narration, selected by Mahdî Muntazir Qâ’im, Ansaryân Publication 2004.
[7] Cette notion est parfois traduite par "Esprit Saint" (Rûh al-Qudus), qui est cependant fondamentalement différente de la notion d’Esprit Saint comme troisième personne de la Trinité telle qu’elle est conçue par le christianisme. L’ "Esprit divin" ou "l’Esprit de Dieu" tel qu’il est le plus souvent évoqué dans la tradition islamique fait référence au souffle divin ayant insufflé la vie à Adam et qui, par extension, désigne la part de divin présent dans chaque être animé par ce "souffle". Concernant l’ "annonce" faite à Marie et la naissance miraculeuse du Christ selon l’islam, se référer à l’article "De Sainte Marie à Maryam Moqaddas : la Vierge dans la tradition islamique et la "Maison de Marie" à Éphèse", Revue de Téhéran, avril 2008.
[8] "Pour Dieu, l’origine de Jésus est similaire à celle d’Adam. Dieu l’a créé d’argile, puis lui a dit "Sois !" et il fut." (3:59).
[9] "Et quand Dieu dira : "Jésus, fils de Marie, rappelle-toi Mon bienfait sur toi et sur ta mère quand Je te fortifiais du Saint-Esprit. Au berceau tu parlais aux gens, tout comme en ton âge mûr."(5:110).
[10] Coran, 19:30-32.
[11] Cf. note 8.
[12] "(Rappelle-toi le moment) où les Apôtres dirent : "ô Jésus, fils de Marie, se peut-il que ton Seigneur fasse descendre sur nous du ciel une table servie ?" Il leur dit : "Craignez plutôt Dieu, si vous êtes croyants". Ils dirent : "Nous voulons en manger, rassurer ainsi nos cœurs, savoir que tu nous as réellement dit la vérité et en être parmi les témoins"."Dieu, notre Seigneur, dit Jésus, fils de Marie, fais descendre du ciel sur nous une table servie qui soit une fête pour nous, pour le premier d’entre nous, comme pour le dernier, ainsi qu’un signe de Ta part. Nourris-nous : Tu es le meilleur des nourrisseurs." "Oui, dit Dieu, Je la ferai descendre sur vous. Mais ensuite, quiconque d’entre vous refuse de croire, Je le châtierai d’un châtiment dont Je ne châtierai personne d’autre dans l’univers." (5:112-115). "La Table Servie" est également le nom de la cinquième sourate du Coran.
[13] Ibid, 5:110.
[14] La sourate Al-Ikhlâs résume cette idée d’unicité et de transcendance absolue : "Dis : "Il est Dieu, Unique. Dieu, Le Seul à être imploré pour ce que nous désirons. Il n’a jamais engendré, ni n’a été engendré. Et nul n’est égal à Lui" Ibid, 112:1-4.
[15] Ibid, 5:116.
[16] Ibid, 5:117.
[17] "Je t’enseignais le Livre, la Sagesse, la Thora et l’Evangile." (5:110).
[18] "Et Nous avons envoyé après eux Jésus, fils de Marie, pour confirmer ce qu’il y avait dans la Thora avant lui. Et Nous lui avons donné l’Evangile, où il y a guide et lumière, pour confirmer ce qu’il y avait dans la Thora avant lui, et un guide et une exhortation pour les pieux." (5:46).
[19] Coran, 57:27.
[20] "Mohammad est le Messager de Dieu. Et ceux qui sont avec lui sont durs envers les mécréants, miséricordieux entre eux. Tu les vois inclinés, prosternés, recherchant de Dieu grâce et agrément. Leurs visages sont marqués par la trace laissée par la prosternation. Telle est leur image dans la Thora. Et l’image que l’on donne d’eux dans l’Evangile est celle d’une semence qui sort sa pousse, puis se raffermit, s’épaissit, et ensuite se dresse sur sa tige, à l’émerveillement des semeurs. [Dieu] par eux [les croyants] remplit de dépit les mécréants. Dieu promet à ceux d’entre eux qui croient et font de bonnes œuvres, un pardon et une énorme récompense." (48:29).
[21] Matthieu, 13:23. Nous retrouvons la même parabole dans l’Evangile selon Saint Marc : "D’autres reçoivent la semence dans la bonne terre ; ce sont ceux qui entendent la parole, la reçoivent, et portent du fruit, trente, soixante, et cent pour un", Marc, 4:20.
[22] Matthieu, 13:38.
[23] "Et quand Jésus fils de Marie dit : "ô Enfants d’Israël, je suis vraiment le Messager de Dieu [envoyé] à vous, confirmateur de ce qui, dans la Thora, est antérieur à moi, et annonciateur d’un Messager à venir après moi, dont le nom sera "Ahmad"." (61:6).
[24] Coran, 4:157-158. Au sein même du christianisme, cette thèse est également soutenue par les docétismes.
[25] La figure de l’antéchrist ou du "Christ imposteur" (al Masîh ad-Dajjâl) est une figure de l’eschatologie islamique prétendant tantôt égaler Dieu, tantôt être Dieu lui-même. Selon la tradition islamique, il est notamment prévu que lors du jour du Jugement Dernier, il apparaîtra aveugle de l’œil droit et engagera un ultime combat contre l’Imâm Mahdî ou "l’Imâm du Temps" (Imâm az-Zamân).
[26] "O gens du Livre [chrétiens], n’exagérez pas dans votre religion, et ne dites de Dieu que la vérité. Le Messie Jésus, fils de Marie, n’est qu’un Messager de Dieu, Sa parole qu’Il envoya à Marie, et un souffle (de vie) venant de Lui. Croyez donc en Dieu et en Ses messagers. Et ne dites pas "Trois". Cessez ! Ce sera meilleur pour vous. Dieu n’est qu’un Dieu unique. Il est trop glorieux pour avoir un enfant. C’est à Lui qu’appartient tout ce qui est dans les cieux et sur la terre et Dieu suffit comme protecteur." (4:171).
[27] Nous nous appuyons ici essentiellement sur la précieuse étude réalisée par François Jourdan dans son ouvrage Dieu des chrétiens, Dieu des musulmans, des repères pour comprendre, Editions de l’Œuvre, 2007.
[28] Ibid, p.143.
[29] Bukhârî, 4:54:506.
[30] Coran, 5:82.
[31] Lings, Martin, Le prophète Muhammad, Seuil, 2002.
[32] ’Allâmeh Majlîsî, Bihâr al-Anwâr, 23, 96, 3.
[33] Prône de l’Imâm Mohammad Bâqir (Ve Imâm du chiisme), cité par Corbin, Henry, En islam iranien, aspects spirituels et philosophiques, Gallimard, T. 4., 1971, p.442.
[34] Selon la tradition chiite, la princesse Narkès serait la descendante de Simon Pierre (Sham’ûn), présenté comme étant l’ "héritier spirituel" (wasî) du Christ. Cf. "L’hagiographie du XIIe Imâm" in Corbin, Henry, En islam iranien, aspects spirituels et philosophiques, Gallimard, T. 4. 1971, p.442.
[35] Hagiographie du XIIe Imâm selon Shaykh Sadûq, traduit par Henry Corbin in Corbin, Henry, En islam iranien, aspects spirituels et philosophiques, Gallimard, T. 4., 1971, p.313.
[36] "La conception théophanique (nullement limitée à quelques savants spéculatifs, mais partagée par tous les milieux spirituels où firent éclosion les Apocryphes) est celle d’une Apparition qui est transparition de la divinité par le miroir de l’humanité, à la façon dont la lumière ne devient visible qu’en prenant forme et en transparaissant à travers la figure d’un vitrail. C’est une union qui est perçue non pas au plan des données sensibles, mais au plan de la Lumière qui les transfigure, c’est-à-dire dans la "Présence Imaginative". La divinité est dans l’humanité comme l’Image dans un miroir. […] Par contre, l’Incarnation est une union hypostatique. Elle advient "dans la chair".", Corbin, Henry, L’Imagination créatrice dans le soufisme d’Ibn ’Arabî, Entrelacs, 2006, p.286.
[37] Cette vision est fondée sur l’anthropologie coranique selon laquelle Dieu aurait "insufflé" l’âme de chaque être. Cet événement est notamment relaté dans la sourate al-Hijr, lorsque Dieu s’adresse aux anges : "Je vais créer un homme d’argile crissante, extraite d’une boue malléable, et dès que Je l’aurais harmonieusement formé et lui aurait insufflé Mon souffle de vie, jetez-vous alors, prosternés devant lui" Alors, les Anges se prosternèrent tous ensemble", (15:28-30).
[38] Rûmî, Jalâl-ud-Dîn, Le livre du dedans (Fihi-mâ-fîhi), traduit du persan par Eva de Vitray-Meyerovitch, Albin Michel, Spiritualités Vivantes, 1997.
[39] Rûmî, Jalâl-ud-Dîn, Odes mystiques (Dîwân-e Shams-e Tabrîzî), traduit du persan par Eva de Vitray Meyerovitch et Mohammad Mokri, Points, Sagesses, 1973.
[40] "Il" fait ici référence à l’ "Ami", c’est à dire la recherche de Dieu, ou de l’esprit divin présent dans chaque homme symbolisé par Jésus.
[41] Allusion à la sourate "La Lumière" du Coran.
[42] Rûmî, Jalâl-ud-Dîn, Odes mystiques (Dîwân-e Shams-e Tabrîzî), traduit du persan par Eva de Vitray Meyerovitch et Mohammad Mokri, Points, Sagesses, 1973.
[43] Cette conception du Christ est parfaitement reflétée par cette anecdote citée par Semnânî : "Jésus sommeillait, ayant une brique pour coussin de tête. Alors vint le démon maudit, qui s’arrêta à son chevet. Lorsque Jésus eut perçu la présence du maudit, il s’éveilla et dit : "Pourquoi es-tu venu près de moi, ô maudit ? - Je suis venu chercher mes affaires. - Et quelles affaires sont donc à toi ici ? - Cette brique sur laquelle tu reposes ta tête." Alors Rûh Allah (Spiritus Dei = Jésus) saisit la brique et lui lança à la face". Op. cit. Corbin, Henry, En islam iranien, aspects spirituels et philosophiques, T.3, Gallimard, 1971, p.284.
[44] Cette position a néanmoins été fortement critiquée par certains penseurs et gnostiques chiites comme Haydar Amolî, pour qui le sceau de la walâyat ne peut être que le Premier Imâm.
[45] Coran, 3:14.
[46] Mat. 19:29.
[47] "Les Sept organes subtils selon Semnânî" in Corbin, Henry, En islam iranien, aspects spirituels et philosophiques, T.3, Gallimard, 1971, p.287.