Une caractéristique qui frappe le lecteur du Coran c'est qu'il se distingue dans la manière de présenter et d'ordonner les idées, par rapport à tout autre livre. Alors que nous sommes habitués à voir, dans un livre, les idées rassemblées par thème, les thèmes traités dans des chapitres, le Coran ne peut que surprendre.
En effet , il ne consacre pas une ou plusieurs sourates aux questions relatives aux croyances et à la foi en Dieu, aux prophètes, aux anges ...etc. , comme la classification d'usage dans les livres de 'aqîda par exemple . On n'y trouve pas non plus toutes les règles pratiques de l'islam portant sur l'adoration, les relations familiales, sociales...etc. exposées dans une même sourate, ni une série de sourates successives, comme on le voit d'habitude dans les livres de fiqh .
"Dans une même sourate, le Coran change de sujet, apparemment sans transition (ceci n'est cependant qu'une apparence)..."
Dans une même sourate, le Coran change de sujet d'un verset à l'autre, apparemment sans transition. Or si l'absence de classification thématique dans le Coran est réelle, l'absence de transition quant à elle n'est qu'une apparence. C'est cette particularité du style Coranique qui a poussé certains penseurs non-musulmans à prétendre qu'il n'y a pas de cohérence ni de suite logique des idées dans le Coran.
Cependant, ceux qui maîtrisaient au mieux la langue arabe, qui avaient assisté à la révélation du Coran et qui étaient défiés par lui à plusieurs reprises, avaient toutes les raisons de chercher en lui la moindre faille. Ils n'en avaient, d'ailleurs, épargné aucun effort. Le Coran fait état d'un certain nombre de d'accusations qui étaient faites sur le Prophète (B.S.D.L), on n'a pas reproché au message qu'il annonçait l'incohérence ou le désordre; et pourtant cette variation constante de ton ne peut passer inaperçue. Bien au contraire, elle saute aux yeux dès les premiers passages du Coran. Si tel reproche n'a pu donc être fait c'est qu'ils voyaient et ressentaient bel et bien la cohérence et l'harmonie du message. Et effet cette harmonie, évoquée plus haut au niveau linguistique, ne peut s'accommoder avec l'idée d'incohérence dans le même texte .
Ce style propre au Coran a plus de chance, du fait de cette variation continue des thèmes, de retenir plus longtemps l'attention du lecteur, et d'empêcher qu'il tombe dans la monotonie, en le "secouant" à chaque fois qu'il passe, dans sa lecture, d'un sujet à l'autre .
"... (ceci pour) retenir [...] l'attention du lecteur..."
"... développer chez le lecteur un esprit de synthèse..."
Un deuxième intérêt, d'ordre pédagogique également, consiste au fait que la dispersion des différentes informations sur un même sujet dans plusieurs sourates, impose au musulman un mode d'emploi approprié au Coran qui vise à renforcer son lien avec ce Livre et multiplie ses occasions de lecture. En effet, puisqu'on ne peut pas consulter une question donnée dans un même endroit, on est amené à faire le tour du Coran pour rassembler les différents éléments de sur la question. Ce travail devrait développer chez le lecteur un esprit de synthèse lorsqu'il se penche, à la fin de sa recherche, sur "l'assemblage" de ces morceaux afin de découvrir le fil conducteur et la vision globale du Coran sur la question étudiée .
Enfin, un dernier intérêt de ce style Coranique : Tout ce qui est développé dans le Coran quelque soit la diversité de ses thèmes, ou de leur emplacement dans les sourates, constitue une seule et même entité, qu'on ne peut morceler dans la pratique, réduisant le message du Coran à telle ou telle de ses composantes. En lisant un passage, comme celui de la sourate 2 V. 228- 248 parlant du divorce et intercalé par un appel à la prière ( qui paraît déplacé à première vue ), on pense à une scène quotidienne qui peut être - quelque soit sa nature - interrompue à tout moment par l'appel à la prière. C'est comme si Dieu le Très haut dit au musulman tout en lui parlant des questions de la famille: Que les affaires de ta famille ne te détourne pas de penser à Dieu et d'accomplir tes prières... Car c'est cet esprit imprégné par la présence de Dieu qui permet, même dans le cas d'échec de la vie d'un couple, d'éviter de commettre des injustices... Peut-on dire donc que prière et famille n'ont rien avoir l'une avec l'autre?
Et souligner l'interdépendance entre principe et pratique